Introduite par la loi du 27 juillet 2023[1], la généralisation de la clause résolutoire au sein des baux d’habitation vient renforcer les prérogatives du bailleur à l’égard de son locataire. En outre, cette réforme vient modifier le régime de la clause résolutoire tel qu’il figure à l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989[2].
Concrètement il est désormais possible pour tout bailleur, disposant ou non d’un contrat de bail stipulant une clause résolutoire, de résilier de plein droit le contrat de bail d’habitation pour défaut de :
- paiement du loyer ;
- paiement des charges telles que convenues dans le contrat ;
- versement du dépôt de garantie.
Les parties peuvent toutefois convenir d’étendre le périmètre de cette clause à la non souscription d’une assurance des risques locatifs, ou au non-respect de l’obligation d’user paisiblement des locaux loués en raison de troubles de voisinage constatés par une décision de justice passée en force de chose jugée[3].
I. Régime traditionnel de la clause résolutoire
Initialement l’application de la clause résolutoire relevait de la liberté contractuelle des parties. Le bailleur avait tout intérêt à l’inclure dans le champ contractuel afin de bénéficier de son automaticité. En d’autres termes, cette clause permet de soustraire la résolution du litige à l’appréciation souveraine des juges (Civ . 1er, 25 nov.1986), ce dernier ne pouvant que constater l’acquisition de la clause résolutoire et ordonner les mesures qui s’y rapportent telles que : le prononcé de l’expulsion du locataire, la condamnation en paiement de l’intégralité des loyers impayés ou encore la condamnation au paiement de l’indemnité d’occupation due à la date de la résiliation du bail jusqu’au départ effectif du locataire (cette indemnité étant équivalente au montant des loyers et des charges qui auraient été payés si le bail s’était poursuivi).
Par ailleurs, dès lors que la mise en œuvre de la clause résolutoire ne se heurte à aucune contestation sérieuse, le bailleur pourra saisir le juge du contentieux et de la protection pour que soit ordonné en référé le versement d’une somme provisionnelle équivalente au montant de la dette du locataire.
L’absence de la clause résolutoire dans le contrat de bail d’habitation exposait le bailleur à l’aléa judiciaire qu’implique la résiliation judiciaire (article 1227 du code civil), le juge pouvant en pareil hypothèse s’y opposer.
I. L’obligation d’inclure la clause résolutoire dans le contrat de bail d’habitation
La généralisation de la clause résolutoire opérée par l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 réduit la liberté contractuelle des parties au bénéfice du bailleur. Le texte étant d’ordre public, l’absence de la stipulation d’une telle clause dans un contrat de bail ne saurait faire obstacle à son application.
En dépit du renforcement des prérogatives des bailleurs, le réformateur réserve une marge de manœuvre à l’office du juge en matière de délais de paiement. La faculté d’accorder de tels délais sur demande du locataire (celle-ci pouvant intervenir à tout moment) est strictement encadrée par les dispositions de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1986. En outre, le juge doit au préalable :
- S’assurer que le locataire soit en situation de pouvoir régler sa dette locative et ;
- Vérifier que le locataire ait repris le versement intégral du loyer courant avant l’audience.
En cas de prononcé d’un délai de paiement, celui-ci ne pourra pas excéder 3 ans. En pareil hypothèse, il appartiendra au locataire de saisir le juge d’une demande de suspension des effets de la clause résolutoire pendant une période équivalente au délai de paiement.
Enfin, il convient de relever que le législateur a adopté une mesure beaucoup plus ferme à l’égard du locataire bénéficiant des délais susmentionnés en prévoyant que la clause résolutoire reprend ses effets dès le premier impayé de loyer. Il n’est donc plus nécessaire de démontrer le non-respect du plan d’apurement de la dette locative pour écarter la suspension de la clause résolutoire.
Nul doute que cette réforme ne suffira pas à restaurer pleinement la confiance des propriétaires dans le marché locatif, d’autant que la plupart des contrats de bail d’habitation incluaient déjà une clause résolutoire. Toutefois, les restrictions apportées au pouvoir du juge en matière de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire constituent des efforts notables qui bénéficieront certainement aux bailleurs.
***
Maître Alexandre Leclaire pourra, si vous le souhaitez, vous offrir un accompagnement personnalisé pour vous accompagner dans vos démarches judiciaires ou extrajudiciaires.
[1] LOI n° 2023-668 du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l'occupation illicite
[2] Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986
[3] Article 4.g de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.